Aperçu thématique
Qualité de vie
Introduction
Il existe de multiples
définitions de la « qualité de vie » (« quality of life »), qui diffèrent selon les écoles et selon les objectifs de mesure de celle-ci. (Leplège et Coste, 2001 ; Varricchio, 2006 ; Lindblad et al., 2002 ; Donnelly, 2000 ; Jordhoy et al., 2007 ; Kaasa et Loge, 2003 ; Frost et al., 2002 ; Haas, 1999 ; Anderson et Burckhardt, 1999 ; Ferrans, 1996 ; Harrison et al., 1996 ; Mast, 1995)
L’OMS, dans une perspective de santé publique, définit la qualité de vie comme la perception qu’a un individu de sa position dans la vie, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. Le fait de mettre l’accent sur la culture est caractéristique du projet OMS. (Leplège et Coste, 2001 ; WHOQOL Group, 1995)
Compte tenu de l’ampleur du concept « qualité de vie », certaines définitions et instruments de mesure se focalisent dès lors sur la notion de « qualité de vie liée à la santé ».
Pour la majorité des auteurs, le concept de « qualité de vie liée à la santé » (« health-related quality of life », HRQOL) présente encore un caractère multidimensionnel. On retrouve souvent, dans les instruments de mesure, 4 dimensions principales :
- l’état physique du sujet (capacités physiques, autonomie …),
- ses sensations somatiques (douleurs, conséquences des traumatismes ou des procédures thérapeutiques …),
- son état psychologique (émotivité, dépression, anxiété …),
- ses relations sociales et son rapport à l’environnement familial, professionnel ou amical.
Ce concept implique que l’on ait la possibilité d’analyser la qualité de vie dans ses composantes « liées à la santé » et ses composantes « non liées à la santé ». La perspective HRQOL ne tient donc pas compte de l’interconnexion du statut de l’état de santé avec ces autres aspects de l’existence, comme les variations des habitudes de vie et du niveau des revenus, les dimensions existentielles et spirituelles. Cette difficulté pourrait, selon certains auteurs, rendre peu vraisemblable l’évaluation spécifique de la qualité de vie liée à la santé. Cependant, selon Kaasa et Loge (2003), les définitions de la qualité de vie se situent sur un continuum entre, d’une part, une conception large de la qualité de vie (incluant les aspects liés à la santé et ceux qui ne le sont pas) et, d’autre part, la notion de qualité de vie liée à la santé. (Leplège et Coste, 2001 ; Shimozuma et al., 2007 ; Cella et al., 2002 ; Donnelly, 2000 ; Kaasa et Loge, 2003 ; McSweeny et Creer, 1995)
Enfin, Wen et Gustafson (2004) soulignent l’importance de distinguer et de comprendre les liens entre les notions suivantes : les besoins, la satisfaction et la qualité de vie.
Les études sur la
mesure de la qualité de vie se développent de manière rapide. La véritable nouveauté ne réside pas tant dans l’intérêt que portent les professionnels de la santé à la qualité de vie de leurs patients, que dans leur volonté d’utiliser des instruments qui permettent de la quantifier. Cette dernière tendance s’explique, notamment, par le fait que les professionnels de la santé sont contraints à mesurer et quantifier les résultats des soins. Notons également que les soins de santé adoptent de plus en plus la perspective du patient : ainsi, ils se focalisent davantage sur la qualité de vie (vision holistique des soins). (Leplège et Coste, 2001 ; Kruijver et al., 2006 ; Lindblad et al., 2002; Granda-Cameron et al., 2008; Carlson et Bultz, 2003)
L’utilisation de ces instruments de mesure permet, d’une part, d’aider les soignants dans la pratique quotidienne à dépister les problèmes de manière plus efficace, et, d’autre part, de faciliter la communication entre le soignant et le patient en ce qui concerne la qualité de vie. L’utilisation de ces outils pourrait même contribuer au bien-être des patients. (Kruijver et al., 2006; Pruyn et al., 2004; Lindblad et al., 2002)
Les instruments de mesure de qualité de vie sont constitués d’items ou de questions, qui peuvent être regroupés en dimensions ou concepts (exemple : la mobilité), et auxquels peut être associé un système de recueil des réponses des sujets. Un algorithme permet parfois d’attribuer une pondération aux différentes réponses et de calculer des scores. Les instruments peuvent être catégorisés en fonction : • de l’origine des questions (patients, experts, médecins …), • des méthodes de pondération, • du type de mesure (index ou score global, profils ou score pour chaque dimension …), • de la population concernée,• de la pathologie le cas échéant, • du type d’échelle de mesure (ordinal …).
Selon certains auteurs, les mesures génériques évaluent l’état global des patients et ce, indépendamment de la pathologie. Les mesures spécifiques d’une pathologie (ou d’un groupe de patients particuliers) concernent la partie de la qualité de vie qui est affectée en priorité par la pathologie concernée. Cependant, les définitions des mesures spécifiques et génériques varient dans la littérature. (Leplège et Coste, 2001 ; Varricchio, 2006 ; Cella et al., 2002 ; Donnelly, 2000 ; Kaasa et Loge, 2003 ; Patel et al., 2007 ; Raat et al., 2006 ; Davis et al., 2006 ; Tsimicalis et al., 2005)
Les mesures de qualité de vie personnalisées (exemple : SEIQoL) permettent de prendre davantage en compte le caractère subjectif et individuel de la qualité de vie. Cette approche relativement récente ouvre des perspectives intéressantes quant à la possibilité d’une mesure de la qualité de vie utilisable pour le suivi individuel des patients et ce, en pratique quotidienne. Ces mesures permettent au patient d’identifier et de sélectionner lui-même les aspects de sa vie qui lui sont particulièrement « chers ». Le patient peut ainsi utiliser son propre système de valeur et ses priorités. Notons que ces nouvelles méthodes de mesure représentent une avancée importante dans le domaine des mesures de la qualité de vie et qu’elles sont partiellement en rupture avec l’approche traditionnelle dans laquelle l’hypothèse d’une structure générique commune de qualité de vie prédomine. (Leplège et Coste, 2001 ; Lindblad et al., 2002 ; Kaasa et Loge, 2003)
En ce sens, il est intéressant de noter que Kruijver et al. (2006) recommandent de faire des études d’implémentation, qui ne se focalisent pas de prime abord sur le développement et la validation des échelles de mesure (personnalisées ou non), mais sur les conditions qui inhibent ou facilitent l’utilisation de ces échelles dans la pratique quotidienne. En prenant conscience de ces facteurs inhibiteurs ou facilitateurs et en les adaptant si nécessaire, on peut également développer des guidelines afin de faciliter l’utilisation des échelles de mesure.
Notons, enfin, que plusieurs articles traitent de considérations méthodologiques intéressantes dans le contexte de l’utilisation des échelles de mesure de la qualité de vie. (Varricchio, 2006 ; Lindblad et al., 2002; Cella et al., 2002; Granda-Cameron et al., 2008; Kaasa et Loge, 2003)
Nous avons décidé, dans le cadre de BeST II, de nous limiter à la recherche d’instruments de mesure de la qualité de vie dans les domaines pédiatrique et oncologique.
L’oncologie a des spécificités concernant la mesure de la qualité de vie. Tout d’abord, les cancers peuvent générer des états de santé très dégradés et occasionnent souvent un retentissement psychologique profond. D’autre part, les traitements peuvent être responsables d’effets secondaires très sévères, et leur mise en œuvre se décide après une évaluation rigoureuse des avantages et des inconvénients notamment liés à la qualité de vie. Plus récemment, des considérations économiques ont aussi été introduites dans le champ en raison des coûts très élevés de certaines thérapeutiques. Varricchio (2006) relate que la qualité de vie était la première priorité de recherche pour le Oncology Nursing Society pour la période 2005-2008. Granda-Cameron et al. (2008) mettent également l’accent sur le fait que les infirmières jouent un rôle important dans la mesure de la qualité de vie des patients souffrant de cancers.
Dans BeST II, nous avons décidé de nous focaliser davantage sur le cancer de manière générale. Par contre, nous ne nous sommes pas concentrés sur les instruments de mesure de la qualité de vie qui traitent des éléments suivants de manière spécifique :
- les différents types de cancers (exemple : Prostate Cancer Quality of Life scale),
- l’un ou l’autre symptôme (exemples : Brief Fatigue Inventory, Brief Pain Inventory),
- la qualité de vie des soignants formels ou informels (exemple : Caregiver Quality of Life Index – Cancer),
- l’impact des thérapies (exemples : Therapy Impact Questionnaire, Subjective Chemotherapy Impact scale, Quality of Life Radiation Therapy Instrument),
- le fonctionnement physique (exemple : Eastern Cooperative Oncology Group performance status scale),
- l’ajustement psychologique (exemple : Mental Adjustment to Cancer Scale).
La pédiatrie est également un domaine marqué de plusieurs caractéristiques spécifiques en lien avec la notion de qualité de vie. Ce domaine est d’abord marqué par la difficulté d’administration des auto-questionnaires dans la mesure où ceux-ci ne sont utilisables qu’après 7-8 ans. Avant cet âge (ainsi que chez les personnes souffrant d’un cancer à un stade avancé), il importe de faire appel à des « proxy » ou des proches pour l’évaluation, ce qui pose des problèmes de concordance avec le vécu propre du sujet. D’autres problèmes liés à l’utilisation de mesures de la qualité de vie chez les enfants sont conceptuels et concernent le système de valeurs qu’instrumentalisent les mesures : les enfants ont une vision différente de leur santé, qui n’est pas prise en compte dans les questionnaires usuels souvent développés pour une population d’adultes. Il existe relativement peu de questionnaires développés spécifiquement pour un usage pédiatrique. (Leplège et Coste, 2001 ; Kruijver et al., 2006 ; Kaasa et Loge, 2003)
Eschelles
Dernière mise à jour: 24/10/2020